Jeune berger après la guerre, souvenirs d'enfance

Souvenirs d'enfance ... berger malgré lui

J'ai en mémoire une aventure qui m'a été contée par mon père, montrant avec quelle rigueur la discipline familiale s'exerçait au début du siècle dernier...
Au lendemain de la « grande guerre », les trois villages de Vars regroupaient leurs moutons en un seul troupeau dont la garde était confiée à un habitant du pays pendant les trois mois de l’été. Un appel d'offres était lancé par la mairie afin de désigner celui, le moins disant, qui garderait l'ensemble des bêtes au Vallon Laugier.
Mon père avait alors 15 ou 16 ans. Avec un copain, par une facétie d'adolescent, il eut l'idée saugrenue de concourir à l'appel d'offres en inscrivant un prix très bas. Lors du dépouillement, à la grande surprise de mon grand-père, les deux farceurs furent officiellement désignés suivant le règlement. Malgré l'hésitation bien légitime des adultes, mon grand-père fût intransigeant. Il signifia à mon père de s'exécuter et de partager la période de garde avec son acolyte, soit un mois et demi chacun. « Puisque tu l'as voulu, tu vas y aller ! ». C'est ainsi que mon père s'est retrouvé seul avec son chien et 1100 moutons dans une vallée déserte.
A cause de la solitude, toute la semaine, il attendait avec impatience l'arrivée d'un membre de la famille qui lui apportait le pain et le ravitaillement. Il guettait à la jumelle sur la crête de la Coulette le messager hebdomadaire, souvent son frère. Mon père appréhendait les contrebandiers italiens qui transportaient par la montagne des sacs de sel de l'autre côté des Alpes où l'impôt sur cette denrée était très important. Il craignait que ces « fraudeurs » lui dérobent ses provisions … et le sel de ses moutons. Nouvelle angoisse également lorsqu'il manquait une bête, effrayée par quelque sauvagine et qui s'était blessée gravement ou était morte en chutant dans un éboulis. Il fallait alors prouver au propriétaire que l'animal n'avait pas été vendu. Pour cela, il découpait avec son couteau la marque inscrite à la poix sur le dos du mouton, ce qui rassurait le propriétaire !
Cette vie régulière de berger a été interrompue un jour de façon inattendue : le 15 août très tôt le matin, il eut la surprise de voir se profiler sur la crête, une silhouette qui ne pouvait être celle du porteur de ravitaillement, l'heure n'étant pas habituelle : c'était son père. Ce dernier arrivé près de son fils lui dit : « aujourd’hui c’est le 15 août, c'est la fête à Sainte-Marie, je viens te remplacer, va t'amuser, n'oublie pas de me relever ce soir ! ». Malgré la rudesse des comportements due à une vie difficile, voilà la preuve d'une belle solidarité familiale.
A la fin de la période des alpages, mon père certainement endurci, mais soulagé de rentrer à la maison, s'était promis de ne plus jamais renouveler une telle expérience !'

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